Évaluation de la douleur
- L’évaluation de la douleur est indispensable avant toute initiation d’un traitement antalgique.
- À réaliser avant la mise en route du traitement et à répéter très régulièrement afin d’en évaluer l’efficacité.
- Privilégier l’auto-évaluation.
- Caractériser l’intensité ainsi que le mécanisme de la douleur (nociceptive, neuropathique, mixte…).
- Cf. Évaluation de la douleur.
Traitement étiologique
- À rechercher en priorité.
- Prise en charge d’une constipation, d’une mycose, soins locaux en cas de plaie ou d’escarre…
Le traitement étiologique ne doit pas retarder la prise en charge antalgique si nécessaire.
Traitements non médicamenteux
- Écoute, réassurance, échange et réévaluation régulière de la douleur.
- Kinésithérapie, balnéothérapie.
- Psychothérapie verbale : TCC, psychothérapie de soutien, …
- Relaxation, méditation, hypnose, …
- Installation adaptée : fauteuil, lit, matelas…
- Bouillote, glace, conseils pratiques…
Traitements médicamenteux
- L’OMS propose une classification des antalgiques selon 3 paliers, utilisés en fonction de l’intensité de la douleur.
- En cas de douleurs intenses, un traitement par antalgiques de palier 3 peut être prescrit d’emblée.
- Les antalgiques de palier 3 prescrits de façon adéquate n’ont pas plus d’effets secondaires que les antalgiques de palier 2.
Palier 1
Les antalgiques du palier 1 peuvent être associés à des antalgiques des paliers 2 et 3 si besoin, ou être associés entre eux.
PARACETAMOL
- Posologie : 1g toutes les 6 heures.
Maximum 4 g par jour chez l’adulte de plus de 50kg.
Maximum 3g par jour :
- chez l’adulte de moins de 50kg,
- en cas d’insuffisance hépatocellulaire légère à modérée,
- en cas d’insuffisance rénale avec DFG inférieur à 30ml/min. - Voies d’administrations : orale (gélules, comprimés, buvable), rectale, injectable IV. Cf Voies d’administration alternatives
- Délai d’action : Environ 30 à 60 minutes par voie orale, 15 minutes par voie IV.
- Durée d’action : Environ 4 à 6 heures par voie orale ou voie IV
- Effets indésirables : Risque d’atteinte hépatique grave en cas de surdosage (précautions particulières chez les patients âgés, les jeunes enfants, en cas d’atteinte hépatique préexistante, de malnutrition, d’alcoolisme chronique…)
Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)
- En seconde intention après le paracétamol.
Contre-indications : antécédents d’ulcère gastro-duodénal, hémorragie, insuffisance rénale avec DFG inférieur à 30 ml/minute, insuffisance cardiaque ou hépatique sévère.
Interactions médicamenteuses : anticoagulants, anti-agrégants, corticoïdes, anti-hypertenseur.
NB : Majoration du risque d’hyperkaliémie et d’insuffisance rénale aiguë, notamment avec les diurétiques de l’anse (ex : Furosémide (Lasilix®)), les IEC et les ARA2.
Risque de dissimulation des symptômes d’une infection sous-jacente. - Voies d’administration : orale (comprimés, comprimés orodispersibles, granulés pour solution buvable), injectable (IV ou IM), suppositoires, application locale. Cf Voies d’administrations alternatives
- Délai d’action : selon les molécules, 1 à 2 heures.
- Exemples : Ibuprofène (Nurofen®, Advil®, Antarène®…), Ketoprofène (Profenid®, Profenid LP®, Bi Profenid LP®…), Diclofenac (Voltarène®, Flector®…) …
NEFOPAM
- Posologie : une ampoule de 20 mg toutes les 6h, maximum 120 mg/jour
- Voies d’administration : IM ou IV lente.
L’administration par voie orale (sur un sucre) est hors AMM. Cf Voies d’administration alternatives. - Délai d’action : 30 à 60 minutes environ.
- Durée d’action : la demie-vie plasmatique est de 5 heures environ.
- Effets indésirables :
Effets anti-cholinergiques : rétention aiguë d’urines, glaucome aigu… À utiliser avec précautions chez la personne âgée.
Risque de pharmacodépendance : ne pas utiliser en cas de douleurs chroniques.
Palier 2
Ces traitements peuvent être associés si besoin avec des antalgiques du palier 1 (Paracétamol ou AINS).
Ne jamais associer avec un autre médicament du palier 2 ou un médicament du palier 3.
Effets secondaires
- Les effets secondaires communs à tous les antalgiques de palier 2 sont les effets secondaires des opiacés : constipation, nausées, vomissements, troubles de l’humeur et du sommeil, réaction allergique à type de prurit, urticaire ou rash cutané.
Risque de dépression respiratoire : attention aux interactions médicamenteuses (benzodiazépines), et chez les patients asthmatiques ou insuffisants respiratoires.
Risque de syndrome de sevrage à l’arrêt du traitement : arrêt progressif en cas de traitement prolongé. - Effets secondaires propres au Tramadol :
Risque de convulsions,
Risque d’hypotension artérielle orthostatique, voire collapsus cardiovasculaire,
Tachycardie, palpitations.
Opioïdes faibles
OPIUM
- Existe uniquement sous forme combinée avec le paracétamol.
- Délai d’action : 30 à 60 minutes.
- LAMALINE® :
Contenu d’une gélule : 10mg d’opium, 300mg de paracétamol et 30mg de caféine par gélule.
Posologie : 10 à 20 mg d’opium par prise (soit 1 à 2 gélules ou 1 suppositoire), à renouveler au bout de 4h si besoin.
Dose maximale : 100 mg d’opium par jour (soit 10 gélules ou 6 suppositoires). - IZALGI® :
Posologie : 25 mg d’opium et 500 mg de paracétamol par prise (soit 1 gélule), à renouveler au bout de 4 à 6 heures si besoin.
Dose maximale : 100 mg d’opium par jour (soit 4 gélules).
Les gélules ne doivent pas être ouvertes.
En cas d’insuffisance hépatique ou rénale sévère (clairance<10ml/min), ou chez le sujet âgé, augmenter l’intervalle entre deux prises ou diminuer les doses.
CODÉINE
- Existe uniquement sous forme combinée avec le paracétamol.
- Posologie : 20 à 60 mg de codéine et 300 à 1000 mg de paracétamol (soit 1 à 2 comprimés) toutes les 6 heures.
- Dose maximale : Ne pas dépasser 240 mg de codéine et 4 g de paracétamol par jour.
- Voies d’administration : comprimés (effervescent ou non), gélules. Cf Voies d’administrations alternatives.
- Délai d’action : 30 à 45 minutes.
- Durée d’action : 4 à 6 heures.
En cas d’insuffisance hépatique ou rénale (clairance <30 ml/min), ou chez le sujet âgé, augmenter l’intervalle entre deux prises ou diminuer les doses.
TRAMADOL
- La posologie maximale de Tramadol ( LI et/ou LP) est de 400 mg au total par 24h.
En cas d’insuffisance hépatique ou rénale (clairance <30ml/min), ou chez le sujet âgé, augmenter l’intervalle entre deux prises ou diminuer les doses.
Éviter l’utilisation des comprimés à libération prolongée chez les patients insuffisants hépatiques ou rénaux.
TRAMADOL associé au paracétamol
- Contenu : 37,5mg de Tramadol et 325mg de Paracétamol par comprimé (Ixprim®).
- Posologie : Dose initiale de 75 mg de Tramadol et 650 mg de Paracétamol (soit 2 comprimés), à renouveler toutes les 6 heures si besoin.
- Dose maximale : 300 mg de Tramadol et 2600 mg de Paracétamol par jour, soit 8 comprimés.
- Voies d’administration : comprimés effervescent ou non. Cf Voies d’administration alternatives
TRAMADOL seul
- Forme à libération immédiate (LI) :
Posologie : 50 à 100 mg toutes les 4 à 6h.
Dose maximale : 400 mg par 24h de Tramadol, prendre en compte les formes LP.
Délai d’action : 30 à 45 minutes par voie orale, 10 à 30 minutes par voie IV.
Durée d’action : 6 à 8 heures
Voies d’administration : Existe en comprimés, comprimés effervescents, comprimés orodispersibles, gélule, solution buvable ou injectable. Cf Voies d’administration alternatives - Forme à libération prolongée (LP) :
Posologie : 50 à 100 mg toutes les 12h. Possibilité de monter à 150 mg voire 200 mg toutes les 12h en cas de douleur non contrôlée.
Dose maximale : 400 mg par 24h de Tramadol, prendre en compte les formes LI.
Délai d’action : 2 à 4 heures.
Durée d’action : 12 à 24 heures
Voies d’administration : Comprimés ou gélules, qui ne doivent pas être écrasés ou ouvertes. Cf Voies d’administration alternatives
DIHYDROCODÉINE
- Posologie : 60 mg à renouveler au bout de 12h si besoin (Dicodin LP®).
Débuter à dose réduite en cas d’insuffisance hépatique, rénale ou chez le sujet âgé. - Dose maximale : 120 mg par jour.
- Voies d’administration : Comprimés ne devant pas être écrasés. Cf Voies d’administration alternatives.
- Délai d’action : 2 heures.
En cas d’insuffisance hépatique ou rénale (clairance <30 ml/min), ou chez le sujet âgé, augmenter l’intervalle entre deux prises ou diminuer les doses.
Palier 3
- Possibilité d’associer avec un antalgique du palier 1.
Ne jamais associer un médicament du palier 2 avec un médicament du palier 3. - Pour la prise en charge des douleurs intenses, la morphine est l’opioïde de référence.
- Privilégier la voie orale.
- En cas de voie orale impossible : privilégier la voie sous-cutanée (SC) à la voie intraveineuse (IV), sauf en cas de :
– cathéter intraveineux déjà en place,
– d’œdèmes généralisés,
– d’antécédents de réactions à des perfusions sous-cutanées,
– de circulation périphérique de mauvaise qualité,
– de nécessité d’administrer des volumes importants. - En cas d’utilisation concomitante d’opioïde à libération immédiate et à libération prolongée, privilégier l’utilisation de la même molécule si possible.
Signes de surdosage, effets secondaires, précautions d’emploi
- Le principal effet secondaire des opioïdes est la constipation.
- Elle doit systématiquement être prévenue.
- Les autres effets secondaires ne nécessitent pas de traitement préventif systématique.
- Un avis spécialisé est recommandé en cas de signes de surdosage ou d’intolérance.
NB : Le Fentanyl en patch, du fait de sa cinétique, présente des risques de surdosage importants, et ne devrait pas être utilisé avant d’avoir effectué au préalable une titration avec un autre opioïde.
Signe de surdosage | Prise en charge |
Somnolence | Peut être un signe d’appel précoce d’une décompensation respiratoire. > Augmentation progressive des posologies. > Si besoin, changer de molécule (Cf rotation des opioïdes). |
Dépression respiratoire | > Surtout lors de la phase de titration. > Surveillance médicale rapprochée. > Augmentation progressive des posologies. > Éviter les associations avec d’autres médicaments dépresseurs respiratoires (benzodiazépines en particulier). > Prise en charge en urgence, en service spécialisé. > Antagonisation par Naloxone. |
Pneumopathie d’inhalation | > Traitement antibiotique adapté. |
Myosis | > Prise en charge en urgence, en service spécialisé. > Antagonisation par Naloxone. |
Hypotension artérielle | |
Hypothermie | |
Coma |
Effet secondaire | Prise en charge |
Syndrome de sevrage | > Diminution progressive des doses lors de l’arrêt du traitement |
Constipation | > Prévention systématique par Lactulose. > Si besoin, changer de molécule (moins de constipation sous Fentanyl). |
Nausées, vomissements, anorexie | Présents surtout au début du traitement. > Pas de prévention systématique. > Traitement symptomatique si besoin (Dompéridone, Métoclopramide). > Si besoin, changer de molécule (Cf rotation des opioïdes). |
Sécheresse buccale | > Hydratation suffisante. > Si besoin, changer de molécule (Cf rotation des opioïdes). |
Terrain du patient | Prise en charge |
Insuffisance rénale | > Réduire les doses et/ou allonger les intervalles entre deux doses. > Éviter les formes à libération prolongée (risque d’accumulation). > La molécule à privilégier est le Fentanyl. |
Insuffisance hépatique | > Éviter la voie transdermique. > Les molécules à privilégier sont la morphine et l’hydromorphone. |
Initiation du traitement
- Deux possibilités existent pour l’initiation du traitement :
Opioïde à libération immédiate (LI) ou
Opioïde à libération prolongée (LP) avec interdoses d’opioïde à libération immédiate. - En cas d’insuffisance rénale, éviter les formes à libération prolongée.
- En cas d’insuffisance hépatique, privilégier la morphine et l’hydromorphone.
Opioïdes à Libération Immédiate (LI) (en cas de douleurs très intenses ou difficiles à contrôler)
1ère intention : Morphine
Forme galénique | Exemple de nom commercial | Dosages existants | Écrasable ou ouvrable |
Gélules | Actiskenan® | 5mg, 10mg, 20mg, 30mg | Gélules ouvrables, administrer le contenu dans une alimentation semi-solide sans écraser les granules. |
Comprimés | Sevredol® | 10mg, 20mg | Non écrasable. |
Solution buvable | Oramorph® | 20mg/1ml (1,25mg/goutte), 10mg/5ml, 30mg/5ml, 100mg/5ml | – |
Injectable | Sulphate ou Chorhydrate de Morphine | 0,1mg/ml, 1mg/ml, 10mg/ml, 20mg/ml, 40mg/ml, 50mg/ml | – |
Voie orale
- Posologie : 10 mg per os toutes les 4h. Titrer en augmentant la dose par paliers de 25% à 50%, jusqu’à obtention d’une antalgie suffisante.
Débuter à 5 mg pour les patients fragiles, âgés, avec insuffisance rénale (DFG <30ml/min) ou hépatique. - Délai d’action : 30 à 45 minutes.
- Durée d’action : 4 à 6 heures.
Voie injectable
- En cas de douleur aiguë très intense : Titration IV
Sous surveillance médicale rapprochée en raison du risque majoré de dépression respiratoire.
1 à 3 mg toutes les 5 à 10 minutes, jusqu’à obtention d’une antalgie suffisante. - En cas de douleur chronique : Perfusion continue
SC : débuter à 30 mg/24h
IV : débuter à 20 mg/24h - Délai d’action :
SC : 20 à 30 minutes
IV : 10 à 15 minutes - Durée d’action :
SC et IV : 3 à 4 heures
2ème intention : Oxycodone
Forme galénique | Exemple de nom commercial | Dosages existants | Écrasable ou ouvrable |
Gélules | Oxynorm® | 5mg, 10mg, 20mg | Gélules non ouvrables. |
Comprimés orodispersibles | Oxynormoro® | 5mg, 10mg, 20mg | Ne doit pas être croqué ni avalé tel quel. |
Solution buvable | Oxynorm® | 10mg/ml | – |
Injectable | Oxynorm® | 10mg/ml, 50mg/ml | – |
Voie orale
- Posologie : 5 mg per os, toutes les 4h. Titrer en augmentant la dose par paliers de 25% à 50%, jusqu’à obtention d’une antalgie suffisante.
Débuter à 2,5mg en cas d’insuffisance rénale (clairance <30ml/min) ou hépatique sévère. - Délai d’action : 30 à 45 minutes.
- Durée d’action : 4 à 6 heures.
Voie injectable
- En cas de douleur aiguë très intense : Titration IV
Sous surveillance médicale rapprochée en raison du risque majoré de dépression respiratoire.
1 à 3 mg toutes les 5 à 10 minutes, jusqu’à obtention d’une antalgie suffisante. - En cas de douleur chronique : Perfusion continue
IV ou SC : débuter à 20 mg/24h - Délai d’action :
SC : 20 à 30 minutes
IV : 10 à 15 minutes - Durée d’action :
SC et IV : 3 à 4 heures
Opioïdes à Libération Prolongée (LP)
- En cas d’insuffisance rénale, éviter les formes à libération prolongée, privilégier le Fentanyl.
- En cas d’insuffisance hépatique, éviter la voie transdermique, privilégier la Morphine et l’Hydromorphone.
1ère intention : Morphine
Forme galénique | Exemple de nom commercial | Dosages existants | Écrasable ou ouvrable |
Gélules | Skénan® | 10mg, 30mg, 60mg, 100mg, 200mg | Gélules ouvrables, administrer le contenu dans une alimentation semi-solide sans écraser les granules. |
Comprimés | Moscontin LP® | 10mg, 30mg, 60mg, 100mg, 200mg | Non écrasable |
- Posologie : 30 mg per os toutes les 12 h
Débuter à 10 ou 20 mg pour les patients fragiles (âgés, insuffisants rénaux ou hépatiques) - Interdoses de Morphine LI : équivalentes à 10% de la dose journalière.
En cas de prise de plus de 4 interdoses par jour, celles ci doivent être intégrées à la dose de fond, en les repartissant sur les 2 prises quotidiennes. - Délai d’action : 2 heures.
- Durée d’action: 8 à 12 heures.
2ème intention : Oxycodone
Forme galénique | Exemple de nom commercial | Dosages existants | Écrasable ou ouvrable |
Comprimés | Oxycontin® | 5mg, 10mg, 15mg, 20mg, 30mg, 40mg, 60mg, 80mg, 120mg | Non écrasable |
- Posologie : 10 mg per os toutes les 12 h.
Débuter à 5 mg toutes les 12 h chez les patients fragiles (âgés, insuffisants rénaux ou hépatiques) - Interdoses d’Oxycodone LI : équivalentes à 10% de la dose journalière.
En cas de prise de plus de 4 interdoses par jour, celles ci doivent être intégrées à la dose de fond, en les repartissant sur les 2 prises quotidiennes. - Délai d’action : 1 heure.
- Durée d’action : 12 heures
3ème intention en cas d’intolérance aux autres opioïdes forts : Hydromorphone.
Forme galénique | Exemple de nom commercial | Dosages existants | Écrasable ou ouvrable |
Gélules | Sophidone® | 4mg, 8mg, 16mg, 24mg | Gélules ouvrables, administrer le contenu dans une alimentation semi-solide sans écraser les granules. |
- Équivalence : 60mg de morphine orale équivalent à 8mg d’hydromorphone orale.
L’hydromorphone n’a l’AMM qu’en seconde intention, dans le traitement des douleurs intenses d’origine cancéreuse, en cas d’intolérance ou de résistance aux opioïdes forts de première intention (morphine ou oxycodone). - Posologie : dose quotidienne à répartire en 2 prises espacées de 12h.
Débuter à dose réduite ou espacer les prises en cas d’insuffisance rénale (DFG<30ml/min) ou hépatique sévère. - Adaptation de dose : peut être augmentée par paliers de 30 à 50% si besoin.
- Délai d’action : 2 heures.
- Il n’existe pas de forme à libération immédiate d’hydromorphone, et donc pas de possibilités d’interdose.
Traitement d’entretien
- Le traitement d’entretien repose sur des formes à libération prolongée.
- Poursuivre avec la même molécule que lors de la phase de titration, sauf inefficacité ou effets secondaires incontrôlables qui imposeraient une rotation de morphinique.
- En cas d’insuffisance rénale, éviter les formes à libération prolongée, privilégier le Fentanyl.
- En cas d’insuffisance hépatique, éviter la voie transdermique, privilégier la morphine et l’hydromorphone.
Morphine LP
Forme galénique | Exemple de nom commercial | Dosages existants | Écrasable ou ouvrable |
Gélules | Skénan® | 10mg, 30mg, 60mg, 100mg, 200mg | Gélules ouvrables, administrer le contenu dans une alimentation semi-solide sans écraser les granules. |
Comprimés | Moscontin LP® | 10mg, 30mg, 60mg, 100mg, 200mg | Non écrasable. |
- Posologie :
La dose quotidienne est celle nécessaire pour obtenir une antalgie satisfaisante lors de la phase d’initiation du traitement.
Elle est répartie en 2 prises quotidiennes. - Adaptation de posologie : Si besoin, augmentation de posologie :
soit en répartissant les interdoses LI nécessaires entre les prises du matin et du soir (1 interdose = 10% de la dose journalière),
soit en augmentant la dose de fond par paliers de 30 à 50%. - Délai d’action : 2 heures.
- Durée d’action : 8 à 12 heures.
Oxycodone LP
Forme galénique | Exemple de nom commercial | Dosages existants | Écrasable ou ouvrable |
Comprimés | Oxycontin® | 5mg, 10mg, 15mg, 20mg, 30mg, 40mg, 60mg, 80mg, 120mg | Non écrasable |
- Posologie :
La dose quotidienne est celle nécessaire pour obtenir une antalgie satisfaisante lors de la phase d’initiation du traitement.
Elle est répartie en 2 prises quotidiennes. - Adaptation de posologie : Si besoin, augmentation de posologie :
soit en répartissant les interdoses LI nécessaires entre les prises du matin et du soir (1 interdose = 10% de la dose journalière),
soit en augmentant la dose de fond par paliers de 30 à 50%. - Délai d’action : 1 heure.
- Durée d’action : 12 heures.
Fentanyl transdermique
Forme galénique | Exemples de nom commercial | Dosages existants | Découpage |
Dispositif transdermique | Durogesic®, Matrifen® | 12µg/h, 25µg/h, 75µg/h, 100µg/h | Peuvent être coupés si besoin. |
- Utilisation :
Le Fentanyl transdermique peut être utilisé chez des patients dont la douleur est stable.
La cinétique du Fentanyl transdermique le rend inadapté à la titration.
Le dispositif transdermique est à changer toutes les 72h.
La plupart des patchs peuvent être coupés.
Cf Patchs : Structures et aspects pratiques – Hôpitaux Universitaires de Genève. - Équivalence : 60mg de morphine orale équivalent à 25μg/h de Fentanyl transdermique.
- Délai d’action : 12 heures.
- Durée d’action : 2 à 3 jours.
En cas de fièvre, surveiller l’apparition d’effets indésirables (augmentation de la libération de Fentanyl par le patch).
Forme transdermique à éviter en cas d’insuffisance hépatique.
Hydromorphone LP
Forme galénique | Exemple de nom commercial | Dosages existant | Écrasable ou ouvrable |
Gélules | Sophidone® | 4mg, 8mg, 16mg, 24mg | Gélules ouvrables, administrer le contenu dans une alimentation semi-solide sans écraser les granules. |
- Équivalence : 60mg de morphine orale équivalent à 8mg d’hydromorphone orale.
L’hydromorphone n’a l’AMM qu’en seconde intention, dans le traitement des douleurs intenses d’origine cancéreuse, en cas d’intolérance ou de résistance aux opioïdes forts de première intention (morphine ou oxycodone). - Posologie : dose quotidienne à répartire en 2 prises espacées de 12h.
Débuter à dose réduite ou espacer les prises en cas d’insuffisance rénale (DFG<30ml/min) ou hépatique sévère. - Adaptation de dose : peut être augmentée par paliers de 30 à 50% si besoin.
- Délai d’action : 2 heures.
- Il n’existe pas de forme à libération immédiate d’hydromorphone, et donc pas de possibilités d’interdose.
Rotation des opioïdes
La rotation des opioïdes se définit par le changement d’un opioïde par un autre. ayant pour but d’améliorer la balance bénéfice-risque du traitement par opioïde.
Pourquoi effectuer une rotation des opioïdes ?
- Indication principale :
Effets indésirables rebelles (en particulier : troubles des fonctions cognitives, hallucinations, myoclonies et nausées) malgré un traitement symptomatique adéquat (le plus souvent avec de fortes doses d’opioïdes). - Autre indication : (rare)
Phénomène de résistances aux opioïdes : absence d’efficacité de l’opioïde AVEC une absence d’effet indésirable malgré une augmentation massive et rapide des doses de l’opioïde.
Comment calculer la dose d’opioïdes à mettre en place ?
- La posologie du nouvel opioïde doit être déterminée en se basant sur les tables d’équiantalgie, en calculant la dose totale reçue sur les 24 dernières heures.
- La conversion se fait toujours en passant par la morphine orale comme opioïde de référence.
Par précaution, il est conseillé de diminuer de 30 à 50% les doses, pour tenir compte de l’effet de tolérance, en particulier chez un patient mal soulagé ou avec des effets secondaires importants. - Lors d’un changement de molécule chez un patient déjà bien soulagé, il n’est pas nécessaire de diminuer les doses.
- Il existe différents outils d’aide à la conversion :
Table d’équiantalgie, à laquelle il est recommandé d‘appliquer la diminution de posologie lors de la conversion.
Site Opioconvert, qui applique automatiquement une diminution des doses lors de la conversion.
Équivalences des voies d’administration
Molécule | Voie orale | Voie IV | Voie SC |
Morphine | 1 | 1/3 | 1/2 |
Oxycodone | 1 | 1/2 |
Équivalences entre les molécules
Morphine orale | Oxycodone | Fentanyl transdermique | Hydromorphone |
1 | 1/2 | 1/2,4 (60 mg de morphine pour 25µg de fentanyl) | 1/7,5 (60mg de morphine pour 8mg d’hydromorphone) |
Comment effectuer la mise en place de la nouvelle molécule ?
Ancienne galénique | Nouvelle galénique | Modalités |
Forme orale LP | Forme orale LP | Remplacer par la nouvelle molécule à l’heure prévue de la prise. |
Forme orale LP | Fentanyl transdermique | Dernière prise orale LP au moment de l’application du patch. |
Forme parentérale continue, IV ou SC | Fentanyl transdermique | Arrêt de la perfusion au moins huit heures après la pose du premier patch. |
Forme parentérale continue IV ou SC | Forme orale LP | Arrêt de la perfusion au moment de la première prise orale LP. |
Fentanyl transdermique | Forme orale ou parentérale | Enlever le patch. Puis faire une titration orale ou parentérale, dès que la douleur réapparaît (parfois 12 à 24h après le retrait du patch). Le traitement de fond est à introduire dans un deuxième temps. |
Accès douloureux paroxystiques (ADP)
Un avis spécialisé est recommandé.
- Définition : Les accès douloureux paroxystiques (ADP) sont des exacerbations douloureuses transitoires intenses, survenant sur un fond douloureux bien contrôlé par un traitement antalgique adapté.
- Rythme : Aucun. Survenue sans lien ni avec la dose, ni avec le rythme d’administration du traitement de fond.
- Pic douloureux : Paroxysme atteint en moins de 3 minutes.
- Durée : Moins de 30 minutes dans la moitié des cas.
- Ils doivent être traités par un opioïde d’action rapide, à la demande : le fentanyl transmuqueux est à privilégier.
Si le patient présente plus de 4 ADP par jour, le traitement de fond doit être réévalué.
Ne pas confondre les ADP avec les accès douloureux survenant en fin de dose et justifiant une augmentation du traitement de fond ou des interdoses.
Fentanyl transmuqueux
- Utilisation :
Le Fentanyl transmuqueux n’a l’AMM que pour le traitement des accès douloureux paroxystiques chez des patients recevant déjà un traitement de fond morphinique pour des douleurs chroniques d’origine cancéreuse.
Son utilisation doit toujours se faire sous surveillance médicale en raison d’un risque accru de dépression respiratoire.
Les différentes formes ne sont pas équivalentes entre elles.
Risque de pharmacodépendance important. - Posologie :
Débuter le traitement à la dose la plus faible possible, puis augmenter jusqu’à obtenir une antalgie satisfaisante.
Titration nécessaire lors de l’initiation du traitement ET lors du passage d’une forme à une autre.
Le traitement par fentanyl transmuqueux doit être arrêté dès la disparition des ADP. - Délai d’action : Rapide, 5 à 10 minutes.
Le Fentanyl transmuqueux ne doit pas être considéré comme une interdose du Fentanyl transdermique, lorsque celui-ci est utilisé en traitement de fond.
Nom commercial | Dose initiale | Nombre maximum d’unités par ADP | Dose maximale |
ABSTRAL® comprimé sublingual | 100µg | 2 | 800µg par ADP, 4 prises par jour |
ACTIQ® comprimé + applicateur buccal | 200µg | 2 | 4 prises par jour |
BREAKYL® film orodispersible | 200µg | 1 | 4 prises par jour |
EFFENTORA® comprimé gingival | 100µg | 2 | 800µg par ADP, 4 prises par jour |
INSTANYL® pulvérisation nasale | 50µg | 2 | 4 prises par jour |
PECFENT® pulvérisation nasale | 100µg | 2 | 800µg par ADP, 4 prises par jour |
RECIVIT® comprimé sublingual | 133µg | 2 | 800µg par ADP, 4 prises par jour |
Sources
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Dernière mise à jour : 14/04/2021